Une fois le diagnostic d’autisme posé, on découvre souvent que les personnes avec un TSA ont des particularités sensorielles.
C’est même dans un des critères de diagnostic (DSM 5 – « Hyper ou hyporéactivité aux stimulations sensorielles ou intérêt inhabituel pour les aspects sensoriels de l’environnement »).
C’est aussi maintenant reconnu qu’une personne avec ‘juste’ un TDAH peut avoir des particularités sensorielles même si l’intensité est un petit peu différente.
Si tu découvres le sensoriel :
En résumé les personnes autistes (ou TDAH) vont ressentir de façon beaucoup plus intense et détaillée ou faible/imprécise les informations captées par les 8 sens.
On peut avoir des hyper-sensibilités (trop fort), des hypo-sensibilités (trop faible) ou un mélange des 2 et ces sensations peuvent varier dans une journée et avec le temps (sinon c’est pas drôle).
Tu connais les 5 sens : audition, vue, toucher, gout, odorat) mais il existe 3 autres invisibles, mal connus et très liés entre eux et dont je vais te parler aujourd’hui:
Sens Invisible #1 – Le système vestibulaire : les GPS et gyroscope de ton corps
C’est la capacité à situer et positionner son corps dans l’espace et à assurer son équilibre. Ce sens est lié à l’oreille interne.
Par exemple, une personne qui a le mal des transports a une hypersensibilité vestibulaire (hyper) et un enfant qui adore tournoyer a besoin de stimulation vestibulaire (hypo).
Sens Invisible #2 – Le proprioceptif – le contrôleur de la force et de la coordination
C’est savoir adapter sa posture et ses mouvements en fonction du contexte. Les capteurs proprios se trouvent dans les muscles, tendons, articulations et dans l’oreille. Ils alimentent aussi la conscience corporelle et la coordination.
Dans l’autisme, on voit souvent de l’hyposensibilité proprio, un exemple commun est la force démesurée qu’applique un enfant sur son stylo ou sa feuille pour écrire, lui causant rapidement des douleurs ou sa difficulté à doser sa force avec une balle.
Ce déficit doit aussi contribuer aux difficultés de coordination qu’on retrouve chez beaucoup de personnes autistes, sans toutefois être considérées comme ayant un trouble de la coordination (dyspraxie).
On comprend aussi l’intérêt du sport et de l’activité dans le développement de la proprioception.
Sens Invisible #3 – L’intéroception : la sentinelle de ton corps et de ton esprit
C’est la capacité à ressentir les sensations internes physiques ‘vitales’ comme la faim, la soif, le chaud ou le froid, la douleur bref tout ce qui semble ‘évident’ pour une personne neuro-typique et surtout relativement automatique.
L’intéroception affecte aussi la capacité à détecter ses émotions, puisque chaque émotion est accompagnée de manifestations physiques (avant ou après qu’on détecte l’émotion).
Par ex, quand on a peur, le rythme cardiaque s’accélère (notre corps se prépare à courir ou combattre), même si on ne réalise pas vraiment, notre cerveau lui reçoit l’information et à un moment tu prends conscience d’avoir peur (ton cerveau ayant lui capté l’info physique).
De la même façon, si pour une raison ‘artificielle’ ton coeur se met à battre très vite, ça peut aussi te causer de l’anxiété sans cause apparente parce que ton cerveau applique le système de reconnaissance.
TDAH, Je suis très sensible à la micro dose d »adrénaline dans les anesthésiants dentaires, ils déclenchent chez moi une accélération du rythme cardiaque qui fait que je passe de ‘détendue’ (j’ai pas peur du dentiste) à totalement flippée en quelques minutes. Une fois que j’ai compris le coupable, l’effet sur ma peur est beaucoup plus faible mais il reste quasiment systématique. C’est mon intéroception, hypersensible ici, qui prend les commandes.
Ce sens, très souvent hyposensible en cas d’autisme, est assez mal connu mais les anglo-saxons l’incluent de plus en plus car il est critique pour améliorer non seulement le quotidien au niveau régulation physique (faim, soif, sommeil, douleur) mais aussi pour aider à la régulation émotionnelle.
C’est ce déficit d’intéroception qui fait que les échelles qu’on montre aux enfants en leur disant “où te situes tu sur le baromètre de douleur” ne marche pas souvent (mes enfants ont toujours mis 10/10 ou 0/10 pour tout) ou qu’ils te montrent l’ensemble de leur abdomen quand tu demandes où ils ont mal.
Ils sont comme une personne dans la forêt sans boussole à qui tu demandes le nord.
Idem pour les ‘reconnais ton émotion parmi ces bonhommes’.
Pour beaucoup de personnes autistes ces questions n’ont aucun sens tant qu’elles n’associent pas l’émotion (ex la peur) a une série de sensations physiques qu’elles sont en mesure de détecter.
Il faut donc commencer par améliorer le détecteur interne en associant des situations à des sensations.
Un de mes enfants ne ressent pas beaucoup la faim.
Progressivement je lui ai fait remarquer que quand il commençait à s’énerver, la première chose à faire était de se demander si il avait mangé depuis longtemps ou pas.
A force de lui faire remarquer cette situation et de lui poser la question as-tu faim + lui faire constater qu’une fois de la nourriture avalée, il était plus calme, il a commencé à développer la capacité à l’identifier lui-même.
Si j’avais commencé par ‘as-tu faim?’ ça n’aurait pas marché.
Un autre exemple est d’apprendre à Gaston que, quand il a envie de taper, qu’il se sent chaud ou qu’il commence à s’agiter, il est fort probable qu’il soit en colère ou énervé.
Mais si Gaston ne sait pas quand il a chaud ou quand il a froid, détecter ça est la première chose à lui apprendre, en lui montrant par ex des signes visibles de chaleur (visage rouge, sueur) ou de froid (changement de couleurs de ses mains, frissons).
Tout ce qui permet de rendre concret ces concepts abstraits facilite le développement de ce sens.
Comme tu vois l’intéroception est un sujet complexe et fascinant et qui affecte beaucoup de choses au quotidien.
C’est un des sens dont on va régulièrement parler sur Hapyk, en commençant lors du Webinar le 23 Janvier sur l’impact du Sensoriel sur le Quotidien.
Ce Webinar reprend les bases des particularités sensorielles dans les TND (TSA et TDAH) et te donnera des clés pour commencer à améliorer les choses pour ta famille, en capitalisant sur ce que tu as déjà observé au fil du temps.
En attendant, pour ceux que l’intéroception intrigue, Meghan Neff, une psychologue américaine autiste et TDAH, a dédié un long article (en anglais) sur la question. Elle y développe des solutions.
0 commentaires